samedi 21 novembre 2020

Who's the Mystery Boy ?

 

Vivant à l'écart de la place publique, serein, contemplatif, amoureux bucolique, Paul Meurisse n'a jamais cédé aux trompettes de la renommée. Il fut bien un temps grisé par l'argent facile, selon ses dires, mais comment, et pourquoi lui en vouloir. Le hic se trouve autour de son interprétation fantomatique et de son teint livide dans Le déjeuner sur l'herbe de Jean Renoir en 1959. Film qui, à sa décharge, ne fut sauvé ni par le sortilège d'une flute enchantée, ni par le si beau décor naturel de Provence. In fine, c'est l'histoire de Jean enfant, désirant se blottir à nouveau au creux de la chair offerte de Gabrielle sa nourrice, muse d'Auguste, le père. Au final, un jardin peu extraordinaire. C'est dommage.  

Foin de ce raté anecdotique, mais qui me tenait à cœur de partager, revenons sur Paul Meurisse ou plutôt sur la singularité de son air lugubre et amusé, qui a bien failli par facilité de réalisateurs en manque d'ambition, le confiner dans le rôle d'un simple gangster, ad vitam æternam. Heureusement, sous le monocle, se cache un homme raffiné et de caractère, au bon sens d'orientation. Ses modèles d'acteurs ne sont autres que Erich von Stroheim, Douglas Fairbanks, et Rudolph Valentino, et déplore à son plus grand regret, l'avènement du parlant qui selon lui, a brisé quelque peu la distance cruciale, la part d'irréel et de féérique, qu'apportait alors le cinéma.

Quel bonheur donc, d'incarner cet abject fumier d'anthologie dans Les Diaboliques de Henri-Georges Clouzot en 1955. Le public est conquis. Stupéfait. Bouleversé par la tournure de l'histoire. On veut sa peau. Le cinéma retrouve sa magie. Les rumeurs sur Clouzot comme à leur habitude, vont bon train, mais notre ami Paul, toujours aussi respectueux et reconnaissant, aime à raconter comment le système ingénieux et cocasse d'une corde attachée à sa cheville et reliée à Clouzot, lui indiquait à quel moment sortir de la baignoire. Certes, ce dernier avait giflé Cécile Aubry dix ans auparavant sur le tournage de Manon, mais c'était sur sa propre demande, celle-ci n'arrivant pas à saisir l'expression juste pour investir cette perverse ingénue. Alors quand on peut faire plaisir..

C'est ainsi qu'un œil en verre et une résurrection plus tard, Paul Meurisse se retrouve à nouveau sous la direction de Henri-Georges Clouzot dans La vérité, avec Brigitte Bardot. Là aussi, on a beau lui expliquer, Brigitte opte pour un jeu de façade, elle est molle, et pas impliquée. Clouzot lui écrase le pied, et sous la douleur violente, elle lui rétorque une gifle magistrale en accusé de réception, se recentre sur son jeu, et croule sous la tirade de maître Eparvier qu'elle prend en plein cœur. Ce sera, une de ses meilleures interprétations.

C'est pour cela aussi que vibre Paul (qui m'excusera je l'espère cette familiarité). Il faut qu'on y croit. Qu'il se passe quelque chose. Même si cette chose est cruelle, douloureuse ou révoltante, comme plus tard en 1974 dans Les suspects de Michel Wyn, qui raconte, à travers l'assassinat d'une jeune américaine libre et candide, dont le corps fut retrouvé dans le sud de la France, l'enquête qui va dévoiler tout ce qu'il y a de plus malsain, de plus ambigüe en chaque suspect, mais également la protection et l'immunité dont certains notables jouissent dans certaines petites villes de Provence. Ce film, de la même fibre que La traque de Serge Leroy, un an plus tard, fait véritablement froid dans le dos. Que rajouter à cela ?

 
👀👀😈👀👀


22 commentaires:

  1. Réponses
    1. C'est exact ;) Je rajouterai quelques lignes et quelques photos demain bravo !

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    2. J'étais pas loin. Et sans tricher.
      )))

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    3. Oui voilà. J'ai donc effacé le commentaire en dessous qui désignait l'endroit où j'avais extrait la photo. Faire recherche google image est à la portée de tous, et empêche les autres de participer, de s'amuser.

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  2. Même pas le temps de jouer... :(
    De toute façon j'aurai proposé neunœil, et j'aurai perdu :)

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    1. Mes doigts refusent de taper son nom, je vais juste taper ces initiales J.M. Le P. ;)

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    2. Ah je vois ;))) Y avait un jeu de société pour enfant Le manoir de l'horreur avec un personnage qui s'appelait neunoeil aussi ;))

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    3. Je ne connais pas. Moi je suis de la génération "Perds pas la boule" :)

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  3. Le temps que je trouve les petites touches pour répondre, et il y avait déjà ma réponse (fausse) de proposée ... je mettre ton blog en alerte comme sur les sites de vente 🤣

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    1. En alerte pour la publication mais si tu remarquera qui n'est pas toujours définitive. Il m'arrive dans le ou les deux trois jours qui suivent de les remanier ;))

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  4. Moi aussi j'aurai dit Chamfort... Bravo à Christophe H!

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  5. Rhôôô putain ! Même pas le temps d'arriver que c'est déjà fini ! Pour le fun, je dirai Louis XIV !!!

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  6. P.S: J'ai enfin complété et terminé ce Mystery Boy, mais j'ai beaucoup souffert. Il s'est passé une chose, je ne sais pas quoi. Une mise à jour, un truc au niveau des photos, je ne comprends pas, qui a sans sommation effacé tout ce que j'avais écrit, les photos etc... Ce papier avait littéralement disparu des écrans radar. J'étais à deux doigts de pleurer. J'ai tout abandonné en je m'y suis remis. Le papier était resté dans les brouillons avec comme unique indication en gros "à demain" et avait conservé tous les commentaires. Je ne saurais jamais ce qui s'est passé, mais voilà, j'y suis arrivée, OUF ! ;))

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    1. Comme les actrices des films que tu cites il a fallu que blogger te colle une mandale virtuelle pour que tu sortes un magnifique texte :)
      Perso j'écris toujours mes présentations à part. Que je garde dans des dossiers avec les photos des posts et les liens. Au cas mon blog disparaitrait subrepticement.
      Paul Meurisse est un personnage mystérieux pour moi. J'ai du mal à le cerner. Dans ses expressions (ou souvent non-expressions) et sa façon de se déplacer, j'ai toujours la sensation d'un type sournois, qui joue double jeu. Tu vas peut-être me dire que ce sont les rôles qui veulent ça...

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    2. Merci ;) Moi je travaille sans filet, et je le reçois par mail une fois publié. C'est vrai que tout bien réfléchi, je pourrais écrire mon brouillon sur word ou open office, un truc du genre..
      J'ai parfois le même ressenti concernant Paul Meurisse. J'ai remarqué qu'il fumait beaucoup lors des interview. Peut-être pour se donner une contenance ou déjouer une grande timidité je ne sais pas. J'étais tenté de lire ses mémoires, mais comme on leur fait dire ce qu'on veut, je m'en suis aussitôt désintéressée ;))

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  7. Le résultat étant superbe, c'est surement une bonne chose si l'ancienne version a été effacée. Peut être une dernière farce signée Diego )))

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    1. Mieux que l'ancienne version oui, merci ;)
      Il n'a pas fini de nous envoyer des signes si on sait regarder où il faut je pense <3

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